{"id":18487,"date":"2023-05-04T09:30:16","date_gmt":"2023-05-04T07:30:16","guid":{"rendered":"https:\/\/www.assassinscollection.it\/non-classifiee\/les-nizarites-la-secte-des-tueurs"},"modified":"2023-05-04T09:30:16","modified_gmt":"2023-05-04T07:30:16","slug":"les-nizarites-la-secte-des-tueurs","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/www.assassinscollection.it\/fr\/non-classifiee\/les-nizarites-la-secte-des-tueurs","title":{"rendered":"Les Nizarites : la secte des tueurs"},"content":{"rendered":"
Temps de lecture : 16 minutes <\/p>
Les Nizarites : la secte des tueurs<\/strong><\/p>\n Nizarites : la secte des assassins \u00e9tait une tribu chiite de l’est de la Perse. Form\u00e9 d\u00e8s le VIIe si\u00e8cle, il fonctionne tout au long du Moyen \u00c2ge, mais conna\u00eet son apog\u00e9e \u00e0 partir de 1094 lorsque le calife fatimide du Caire, Al-Mustansir bi-llah, meurt et qu’une guerre \u00e9clate entre ses deux fils, Nizar et Mustali, pour la succession. La secte se range du c\u00f4t\u00e9 de Nizar, mais les partisans de Nizar sont vaincus en Egypte, d’o\u00f9 le terme de Nizarites apr\u00e8s le schisme qui divise la secte en deux factions : l’une minoritaire, chiite, inspir\u00e9e par le courant politique issu d’Ali, gendre de Mahomet, l’autre, isma\u00e9lite, qui se consid\u00e8re comme la seule v\u00e9ritable d\u00e9positaire des enseignements du proph\u00e8te et v\u00e9n\u00e8re Isma\u00efl, th\u00e9ologien ayant v\u00e9cu au VIIIe si\u00e8cle, comme le septi\u00e8me proph\u00e8te. Au sein des isma\u00e9lites, une secte intransigeante et fanatique se forma dont les membres, les “Fidawi”, \u00e9taient connus sous le nom d'”Assassins” sous la direction de Hasan ibn al-Sabbah dit “Sheikh-el-Jebel” (c’est-\u00e0-dire “vieillard de la montagne”). Fils d’un marchand persan, il eut une id\u00e9e g\u00e9niale pour la secte, celle de la doter d’abris absolument inviolables ; le plus c\u00e9l\u00e8bre est le Nid d’Aigle, \u00e0 Alamuth, une petite ville perch\u00e9e sur une montagne entre T\u00e9h\u00e9ran et la mer Caspienne, absolument imprenable. La l\u00e9gende raconte que Hasan ibn al-Sabbah, un jeune homme d\u00e9guis\u00e9 en mendiant, se rendit aupr\u00e8s du roi pour lui demander l’autorisation d’acheter son ch\u00e2teau. Le roi r\u00e9pondit ironiquement par l’affirmative, car il ne croyait pas que le “mendiant” avait l’argent, mais une fois le d\u00e9guisement enlev\u00e9, il devint le propri\u00e9taire \u00e0 part enti\u00e8re de la forteresse. C’est \u00e0 partir de l\u00e0 qu’il a commenc\u00e9 son travail de recrutement.<\/p>\n Ce n’\u00e9tait pas le seul refuge de la secte, il y en avait d’autres de m\u00eame nature o\u00f9 ils formaient culturellement et “professionnellement” des assassins. Tr\u00e8s vite, Hasan dispose d’un grand nombre de partisans qui lui sont totalement fid\u00e8les et qui sont dot\u00e9s d’une f\u00e9rocit\u00e9 sans pr\u00e9c\u00e9dent. La renomm\u00e9e de la secte s’est imm\u00e9diatement r\u00e9pandue dans tout le Moyen-Orient ; une s\u00e9rie d’assassinats r\u00e9ussis a renforc\u00e9 la terreur et le respect, ce qui a bient\u00f4t menac\u00e9 les int\u00e9r\u00eats chr\u00e9tiens en Terre sainte. Le vieil homme et ses assassins ne doivent cependant pas \u00eatre consid\u00e9r\u00e9s comme de vulgaires tueurs \u00e0 gages ; ils ont appris de nombreuses langues telles que le latin, le grec, le proven\u00e7al, le sarrasin et bien d’autres encore, et, comme nous l’avons mentionn\u00e9 au d\u00e9but, la connotation religieuse \u00e9tait tr\u00e8s forte, et a certainement \u00e9t\u00e9 le moteur de leurs actions. COUTUMES DE LA SECTE<\/strong><\/p>\n Les costumes des tueurs d\u00e9crits dans un livre rare qui a \u00e9chapp\u00e9 \u00e0 l’extermination t\u00e9moignent de l’existence d’un culte et de hi\u00e9rarchies parmi les tueurs. Les initi\u00e9s ne pouvaient gravir l’\u00e9chelle hi\u00e9rarchique que par la formation et l’\u00e9tude assidue des Shuras mahom\u00e9tanes, extr\u00eames comme il se doit par Hasan. La hi\u00e9rarchie se compose de la mani\u00e8re suivante : au rang le plus bas se trouvent les fid\u00e8les, \u00e0 qui l’on confie les missions les plus dangereuses et les plus t\u00e9m\u00e9raires, et qui, sous l’emprise de stup\u00e9fiants, ob\u00e9issent aveugl\u00e9ment aux ordres en se lan\u00e7ant dans les exploits les plus audacieux, qu’ils accomplissent dans des lieux bond\u00e9s ou en public, jusqu’au sacrifice extr\u00eame de leur propre vie. Puis les La\u00efcs, les Compagnons et enfin les Ma\u00eetres (Jeunes et Anciens) proches collaborateurs du seul Ma\u00eetre Supr\u00eame. La robe d’un assassin \u00e9tait blanche et rouge, le blanc symbolisant la puret\u00e9 et le rouge le sang. Les couleurs symbolisent le courage (blanc) et l’invincibilit\u00e9 (rouge). Bien qu’il s’agisse de musulmans, leur doctrine pr\u00e9sente des variations consid\u00e9rables : les recrues pouvaient manger du porc (un aliment interdit \u00e0 tout musulman), elles pratiquaient \u00e9galement des orgies incestueuses et perverses, o\u00f9 la pr\u00e9sence des m\u00e8res et des s\u0153urs \u00e9tait une norme.<\/p>\n La meilleure description des pratiques de cette secte nous est peut-\u00eatre donn\u00e9e par Marco Polo dans son journal en ces termes :<\/p>\n “Lo Veglio (…) avait fait entre deux montagnes, dans une vall\u00e9e, le plus beau jardin et le plus grand du monde ; il avait ici tous les fruits et les plus beaux palais du monde, tous peints en or, avec des b\u00eates et des oiseaux. C’est l\u00e0 que l’on menait : pour tel on avait de l’eau, et pour tel du vin. Il y avait l\u00e0 des hommes et des femmes, les plus beaux du monde, qui savaient le mieux chanter, jouer et danser, et il leur faisait croire que c’\u00e9tait le paradis. Il le fit parce que Mahomet avait dit que celui qui irait au paradis aurait autant de belles femmes qu’il le voudrait, et qu’il y trouverait des fleuves de lait, de miel et de vin ; il le rendit donc semblable \u00e0 ce que Mahomet avait dit. Les Sarrasins de cette r\u00e9gion crurent sinc\u00e8rement que c’\u00e9tait l\u00e0 le paradis ; et dans ce jardin n’entrait que celui qui voulait \u00eatre un meurtrier. “A l’entr\u00e9e du jardin, il avait un ch\u00e2teau si fort qu’aucun homme au monde ne le craignait. Veglio gardait \u00e0 sa cour tous les jeunes gens de douze ans qui lui semblaient devoir devenir des hommes courageux. Lorsque Veglio en faisait mettre quatre, dix ou vingt dans le jardin, il leur faisait boire de l’opium, et ils dormaient bien pendant trois jours ; puis il les faisait conduire dans le jardin, et \u00e0 l’heure dite il les faisait r\u00e9veiller. Quand les jeunes gens se r\u00e9veillaient, il \u00e9tait l\u00e0 et ils voyaient toutes ces choses, et ils se croyaient vraiment au paradis. Et ces jeunes filles restaient toujours avec eux dans les chants et les grandes r\u00e9jouissances ; ils en tiraient tout ce qu’ils voulaient, et ils ne quittaient jamais ce jardin. Veglio tient une belle et riche cour, et fait croire aux habitants de cette montagne que tout est comme je vous l’ai dit. Lorsqu’il veut envoyer quelque part l’un de ces jeunes gens, il lui fait donner \u00e0 boire pendant son sommeil, et le fait sortir du jardin pour l’emmener dans son palais. Lorsqu’ils se r\u00e9veillent et qu’ils se trouvent l\u00e0, ils sont tr\u00e8s \u00e9tonn\u00e9s et tr\u00e8s attrist\u00e9s de se trouver hors du paradis. Ils se rendent soudain devant le Veilleur, croyant qu’il est un grand proph\u00e8te, et s’agenouillent. Il leur demande : “D’o\u00f9 viens-tu ?”. Ils r\u00e9pondent : “Du paradis”, et leur racontent ce qu’ils y ont vu, et ils ont un grand d\u00e9sir d’y retourner. Et quand le Sage veut faire tuer quelqu’un, il fait tourner celui qui est le plus vigoureux et lui fait tuer qui il veut ; et ceux qui le font de bon gr\u00e9, pour retourner au paradis. (…) De cette fa\u00e7on, aucun homme ne vit devant le Sage de la Montagne, \u00e0 qui il veut le faire ; et c’est pourquoi je vous dis que beaucoup de rois lui rendent hommage pour cette crainte.<\/em><\/p>\n Leur action ne manquait pas non plus d’un certain caract\u00e8re rituel, puisque toutes leurs victimes p\u00e9rissaient \u00e0 l’arme blanche, sans qu’aucun poison ou arme \u00e0 distance n’ait \u00e9t\u00e9 utilis\u00e9. Le meurtre \u00e9tait donc aussi connot\u00e9 comme un acte sacrificiel. Les anciens cultes de la mort ont ainsi trouv\u00e9 une nouvelle vie dans l’Islam, et le meurtre est devenu non seulement un acte de d\u00e9votion, mais une action sacr\u00e9e, capable de sanctifier ceux qui ont souill\u00e9 leurs mains. Le chroniqueur Guillaume de Tyr raconte :“Imm\u00e9diatement, celui qui a re\u00e7u l’ordre de mission commence sa mission sans penser aux cons\u00e9quences qui peuvent en d\u00e9couler et sans pr\u00e9parer d’\u00e9chappatoire<\/em>. Pour les partisans, l’impunit\u00e9 n’a aucun sens. Une fois captur\u00e9s, ils enduraient n’importe quel ch\u00e2timent, convaincus de la nature h\u00e9ro\u00efque de leur martyre. Sous le commandement de Hassan ben Sabbah, les listes isma\u00e9lites rappellent une cinquantaine d’assassinats, visant \u00e0 cibler des opposants de haut rang et \u00e0 cr\u00e9er un climat de terreur. Personne, aussi bien prot\u00e9g\u00e9 et repli\u00e9 sur lui-m\u00eame soit-il, ne semble \u00e0 l’abri de leurs coups, la d\u00e9termination et la capacit\u00e9 \u00e0 se dissimuler permettant aux assassins de s’approcher de n’importe quelle cible. L’atmosph\u00e8re cr\u00e9\u00e9e par ces actes de violence r\u00e9p\u00e9t\u00e9s est bien d\u00e9crite par un chroniqueur arabe : “Aucun commandant ou fonctionnaire n’osait quitter sa maison sans une escorte. Sous leurs v\u00eatements, ils portaient une armure et le vizir une cotte de mailles.<\/em> De peur d’\u00eatre attaqu\u00e9s, les hauts fonctionnaires du sultan demandaient la permission de porter des armes en sa pr\u00e9sence et il la leur accordait”<\/em>.<\/p>\n L’HISTOIRE<\/strong><\/p>\n En 1090, Hasan \u00e9tablit son quartier g\u00e9n\u00e9ral et sa r\u00e9sidence au Khorasan dans la citadelle imprenable d’AlamutH en Perse, le Nid d’Aigle, \u00e0 1800 m\u00e8tres d’altitude. Le premier \u00e0 \u00eatre assassin\u00e9 est le grand vizir Nizam al-Mulk en 1092, dont les talents de strat\u00e8ge et d’homme d’\u00c9tat avaient \u00e9t\u00e9 importants pour la dynastie seldjoukide en Iran. Les Seldjoukides tentent \u00e0 plusieurs reprises de soumettre Hasan, mais sans succ\u00e8s. Il \u00e9tait un v\u00e9ritable \u00e9lectron libre dans le monde musulman.
\nLes tentatives d’assaut de la principale place forte se sold\u00e8rent par des \u00e9checs ; il y eut notamment un calife qui renon\u00e7a \u00e0 toute ambition le jour o\u00f9 il trouva, sous son oreiller, un poignard de la secte, signe indubitable de la pr\u00e9sence, au sein de sa cour, d’adeptes de la secte.<\/p>\n
\nLe vieil homme de la montagne ne recherchait pas le succ\u00e8s personnel ou la richesse ; l’argent que la secte obtenait pour ses services, souvent sous forme de “pot-de-vin” pour \u00e9viter de plus gros ennuis, \u00e9tait utilis\u00e9 par la secte pour l’endoctrinement et pour les d\u00e9penses li\u00e9es \u00e0 l’entretien de sa petite arm\u00e9e. Bient\u00f4t, le champ d’action s’\u00e9largit ; il est aux d\u00e9pens, par exemple, de Conrad de Montferrat, roi de J\u00e9rusalem, qui est tu\u00e9 par deux assassins.<\/p>\n
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\nPar la suite, certaines sectes d’Assassins s’install\u00e8rent en Syrie, \u00e9galement soutenues par Ridwan d’Alep qui, peut-\u00eatre parce qu’il s’\u00e9tait converti \u00e0 ces doctrines ou parce qu’il avait peu de sympathie pour ses cousins seldjoukides, lui avait accord\u00e9 protection et soutien ; le chef s’appelait Abu Tashir et \u00e9tait un orf\u00e8vre syrien qui exer\u00e7ait une influence sur Ridwan.
\nTancr\u00e8de d’Antioche, fascin\u00e9 par les doctrines ou par son amiti\u00e9 avec Ridwan, se rapproche de la secte.
\nEn 1103, leur premi\u00e8re incursion en Syrie se solde par l’assassinat de l’\u00e9mir de Homs, Janah ed-Daula. En 1106, ils massacrent l’\u00e9mir d’Apam\u00e9e, Khalaf ibn Mulaib, mais seuls les Francs d’Antioche peuvent b\u00e9n\u00e9ficier de cette mort. Plus tard, le chef de l’arm\u00e9e \u00e0 Alep tombe lui aussi sous le poignard des Assassins.
\nEn 1124, Hasan meurt, ses successeurs maintiennent la politique du premier ma\u00eetre supr\u00eame, jusqu’\u00e0 Hasan II qui, en 1165, d\u00e9cide de r\u00e9pudier l’islam et de cr\u00e9er une nouvelle religion au seul profit des Assassins. Ce fut un cataclysme.
\nHasan II est tu\u00e9 dans un complot et le groupe se divise en deux groupes, les Assassins perses et les Assassins syriens, ces derniers \u00e9tant dirig\u00e9s par Sinan ibn Salman ibn Muhammad, un homme brillant mais perfide qui avait deux adversaires aussi rus\u00e9s l’un que l’autre : les Crois\u00e9s et Saladin.
\nOn dit que Saladin \u00e9tait lui aussi terrifi\u00e9 par le pouvoir politique et la facilit\u00e9 de tuer n’importe qui, comme en t\u00e9moignent ces mots rapport\u00e9s par un chroniqueur musulman :
\n“Mon fr\u00e8re (…) m’a racont\u00e9 que Sinan avait envoy\u00e9 un messager \u00e0 Saladin (…), lui ordonnant de lui remettre un message en priv\u00e9. Le Saladin le fit fouiller et, lorsqu’il fut s\u00fbr qu’il ne repr\u00e9sentait aucun danger, il cong\u00e9dia les personnes pr\u00e9sentes en n’en laissant que quelques-unes et lui demanda de lui remettre le message. Mais il lui dit : “Mon ma\u00eetre m’a ordonn\u00e9 de ne pas te le remettre (sauf en priv\u00e9)”.<\/em>. Saladin renvoie alors tous les mamelouks (esclaves non musulmans, notamment des Ouzbeks, des Turkm\u00e8nes, des Kazakhs, etc., principalement employ\u00e9s dans l’arm\u00e9e) \u00e0 l’exception de deux d’entre eux, et d\u00e9clare : “Le Saladin dit alors :“<\/em>Ces deux-l\u00e0 ne me quitteront pas<\/em>. Si tu veux, donne-moi ton message, sinon va-t’en<\/em>“. Il a ajout\u00e9 : “Pourquoi n’avez-vous pas repouss\u00e9 ces deux-l\u00e0 comme vous avez repouss\u00e9 les autres ?”<\/em> Le Saladin a r\u00e9pondu : “Je les consid\u00e8re comme mes enfants, eux et moi ne faisons qu’un.<\/em> Le messager se tourna alors vers les deux mamelouks et leur dit : “Si je t’ordonnais au nom de mon seigneur de tuer ce sultan, le ferais-tu ?”<\/em> Ils r\u00e9pondirent par l’affirmative et tir\u00e8rent leurs \u00e9p\u00e9es en disant: “Ordonnez ce que vous voulez<\/em>. Le sultan Saladin (…) se tait et le messager s’en va, emmenant les deux hommes avec lui.
\nApr\u00e8s ces \u00e9v\u00e9nements, pr\u00e9cise le chroniqueur, Saladin d\u00e9cide de conclure la paix avec les Assassins, mais la secte va bient\u00f4t trouver de nouveaux antagonistes : en 1152, en effet, un chef franc, le comte Raymond II de Tripoli, tombe sous leurs coups. Il est la premi\u00e8re victime chr\u00e9tienne dont les Isma\u00e9lites se souviennent.
\nL’acte le plus marquant contre les Occidentaux sera cependant l’assassinat de Conrad de Montferrat, roi de J\u00e9rusalem. Apr\u00e8s la chute de la ville sainte aux mains de Saladin, le prince italien, qui venait d’arriver en Palestine, a pu organiser h\u00e9ro\u00efquement la d\u00e9fense de Tyr et s’est vu attribuer la couronne du royaume. Un soir, alors qu’il rentre au palais royal, il est abord\u00e9 par deux hommes et, tandis que l’un fait mine de lui remettre une lettre, le second le poignarde. Les assassins \u00e9taient connus \u00e0 la cour et avaient auparavant fait semblant de se convertir au christianisme. Imm\u00e9diatement captur\u00e9s, ils pr\u00e9tendent avoir agi sur ordre de Richard Ier C\u0153ur de Lion, roi d’Angleterre et alors en Terre sainte en tant que crois\u00e9. En effet, il y avait eu de nombreux d\u00e9saccords s\u00e9rieux entre Conrad et le Plantagen\u00eat sur la conduite de la croisade, mais il semble que le Vieux de la Montagne ait agi dans ce cas pour \u00e9liminer un ennemi dangereux, et qu’il ait \u00e9galement r\u00e9ussi \u00e0 semer la discorde dans le camp chr\u00e9tien. Il n’en reste pas moins que les Assassins ont encore frapp\u00e9 avec sagacit\u00e9 et t\u00e9m\u00e9rit\u00e9, tuant le souverain de J\u00e9rusalem lui-m\u00eame.
\nTuer Conrad \u00e9tait en fait le dernier geste de Sinan : le terrible vieillard allait bient\u00f4t mourir, mais son h\u00e9ritage ne serait pas perdu. En fait, les meurtres se sont poursuivis et ce sont surtout les chr\u00e9tiens qui sont tomb\u00e9s. Raymond, fils de Boh\u00e9mond IV d’Antioche, est attaqu\u00e9 dans une \u00e9glise de Tortosa et le chroniqueur Joinville raconte m\u00eame que des \u00e9missaires de la secte demandent \u00e0 Louis IX le Saint, roi de France et deux fois crois\u00e9, un tribut qu’ils payaient d\u00e9j\u00e0 “L’empereur d’Allemagne, le roi de Hongrie, le sultan de Babylone et d’autres encore, parce qu’ils savent qu’ils ne peuvent vivre que le temps qu’il (leur chef) veut bien leur accorder”<\/em>.
\nAu cours du XIIIe si\u00e8cle, cependant, le pouvoir de la secte en Syrie d\u00e9cline lentement et le coup de gr\u00e2ce lui sera donn\u00e9 par l’invasion mongole et l’assaut du sultan mamelouk d’\u00c9gypte Baybars. Certaines sources affirment qu’il ferait appel \u00e0 leurs services. La tentative d’assassinat d’\u00c9douard d’Angleterre et le meurtre de Philippe de Monfort \u00e0 Tyr en 1270 auraient \u00e9t\u00e9 ex\u00e9cut\u00e9s \u00e0 sa demande. En effet, on ne peut pas affirmer avec certitude que des assassinats ont \u00e9t\u00e9 perp\u00e9tr\u00e9s par les Assassins durant cette p\u00e9riode. Finalement, au cours du si\u00e8cle suivant, l’isma\u00e9lisme perdra la plupart de ses adeptes et son influence politique deviendra presque insignifiante. Cependant, dans l’histoire, les Assassins ont laiss\u00e9 une longue tra\u00een\u00e9e de sang en souvenir de leur foi, tandis que leur nom reste inextricablement li\u00e9 au plus vieux crime jamais commis par l’homme.<\/p>\n